Réunion du FOMC : une réaction excessivement optimiste du marché?

28 juillet 2022

FOMC | US | USA | economy | monetary | Federal Reserve

Principaux points à retenir :
 

  1. Décision du FOMC1: hausse des taux de 75 points de base conforme aux attentes du marché et aux orientations de la Fed.
  2. A l'avenir, le rythme des hausses de taux devrait ralentir et dépendra des données macroéconomiques.
  3. Les taux des Fed funds se rapprochent progressivement du niveau où ils devraient être, ce qui alimente l'optimisme des marchés quant au fait que la Fed deviendra moins restrictive dans les mois à venir.
  4. La réaction importante du marché le 27 juillet (Nasdaq +4%) est peut-être un peu excessive, les investisseurs doivent garder à l'esprit que i.) les hausses de taux ne sont pas encore terminées ii.) les risques de récession sont toujours présents iii.) rien ne prouve encore que la Fed a gagné la bataille contre l'inflation.
  5. Les investisseurs doivent donc rester neutres sur les taux longs et continuer à se concentrer sur les actions sur les segments Qualité et Croissance profitable. Il est trop tôt pour devenir agressif en matière d’exposition aux actifs risqués.

1 FOMC : organe de la Réserve Fédérale américaine qui établit la politique monétaire.
 

Quel était l’enjeu réel de la réunion du 27 juillet ?

Il n'y a pas eu de surprise en matière de politique monétaire hier à Washington. La Fed a confirmé le 27 juillet la hausse de 75 points de base de ses taux d'intérêt, envisagée depuis plusieurs semaines et déjà bien intégrée par les marchés.

Les marchés étaient plus attentifs à la tonalité du discours de Jerome Powell et de la session de questions-réponses, à sa perception du risque de récession (qui a fait l'objet de la plupart des questions de la presse) ainsi qu'à ses commentaires sur la trajectoire future de la politique monétaire.

Un chemin étroit pour la Fed ?

La Fed marche sur une corde raide. Elle a souligné à plusieurs reprises qu'elle devait contraindre l'activité économique en dessous de son potentiel - notamment le très bon état du marché de l'emploi - afin de ramener l'inflation vers son objectif, mais sans conduire l'économie en récession.

Sur ce point, la Fed a semblé relativement confiante sur le fait que les États-Unis n’est pas en récession "au moment où nous parlons". Selon Jerome Powell, les outils monétaires et l'approche de la Fed ont la capacité d'ajuster les conditions financières de manière pragmatique et en fonction des données, sans resserrement excessif. Il a insisté sur le fait que le marché de l'emploi reste très solide bien que les créations d'emplois ont commencé à ralentir.

La Fed est-elle optimiste sur le risque de récession, comme elle l’était sur l’inflation temporaire ?

C'est bien sûr notre principal risque et le sujet de nombreuses questions pendant la conférence.

En effet, la publication du PIB du T2 témoigne d'une contraction de l'activité (-0,9% en termes trimestriels annualisés), notamment en raison d'une poursuite du mouvement de déstockage et des investissements qui ont affecté négativement la production malgré des exportations et une consommation qui ont augmenté modérément. Tout en refusant d'apporter une définition alternative de la récession, J. Powell a souligné que l'économie américaine ne montrait pas de signes d'un "déclin généralisé" de l'activité touchant de nombreux secteurs, suggérant qu'une contraction technique du PIB ne serait pas suffisante pour faire dérailler l'agenda de la Fed.

Pourquoi les marchés réagissent-ils positivement à cette réunion sans surprise ?

Les marchés ont pour la plupart accepté l'idée que la politique de la Fed de 2022 est un processus en deux étapes et ne suit pas un cours préétabli. Après les hausses de taux massives destinées à amener les taux d’intérêt des Fed funds aussi vite que possible vers ce que J. Powell considère comme un taux proche de la neutralité (2,25% à 2,5%), le futur plan d'action dépendra totalement des données et sera probablement mené à un rythme plus lent. J. Powell pense toujours que l'économie nécessite des taux d'intérêt un peu plus restrictifs. De plus, si l'on intègre les délais de transmission de la politique monétaire, il a mentionné que "plus de resserrement des conditions financières est déjà dans les tuyaux".

La bataille de l’inflation est-elle déjà gagnée puisque les anticipations d’inflation du marché ont commencé à diminuer ?

C'est une posture tentante pour ceux qui pensent que le rôle de la politique monétaire repose essentiellement sur la gestion des anticipations d'inflation (Graphique 1). J. Powell semble satisfait de voir que les points morts d'inflation diminuent, ce qui reflète la confiance du marché dans l'engagement de la Fed à lutter contre l'inflation. Cependant, étant donné le niveau des surprises sur l'inflation au cours de l'année dernière, J. Powell veut voir des preuves que l'inflation réalisée est effectivement en train de diminuer.

Qu’y a-t-il donc sur la table pour les prochaines réunions de la FOMC ?

Une hausse de 50 points de base en septembre reste le scénario central, mais comme l'a mentionné la Fed, nous recevrons d’ici là deux séries de données mensuelles sur l'inflation et le chômage qui pourraient affecter l'orientation de la politique monétaire. Au-delà de septembre, le message est que les hausses de taux devraient ralentir à 25 points de base, en grande partie en fonction des données à venir et des perspectives économiques. Même si la forward guidance est enterrée, J. Powell a implicitement maintenu l'idée qu'à ce stade, ramener les taux d’intérêt à 3% en fin d'année est probablement une bonne indication de l’action future de la Fed hors dérapage du scenario macroéconomique.

Trop  se  concentrer  sur  l’inflation  risque-t-il  d’entraîner  une  dislocation  du marché ?

J. Powell considère qu'un resserrement de la politique monétaire implique naturellement un durcissement des conditions financières et des ajustements de la valorisation des actifs, qui sont nécessaires. Cependant, il n'y a selon la Fed aucun signe de dislocation financière ou de disparition de la liquidité, et cette réévaluation des primes de risque ne constitue pas un taper tantrum inquiétant. Le message sous- jacent est que la Fed n'est pas inquiète de l'orientation des marchés au cours des derniers mois.

Quelles sont les implications en terme d’allocation d’actifs ?
 

  • Premièrement, cela confirme la position plus constructive sur les taux longs exprimée depuis juin en commençant à augmenter l'exposition aux obligations d'Etat dans les portefeuilles gérés.
  • Deuxièmement, nous pensons qu'il s'agit d'un message de soutien pour les marchés actions et notamment pour les valeurs de qualité et croissance, qui ont souffert d'ajustements de valorisation en raison de la hausse des rendements obligataires.
  • Troisièmement, nous pourrions également observer une réaction positive des spreads de crédit après leur élargissement significatif au cours des derniers mois, notamment dans les obligations de qualité (investment grade).
  • Toutefois, les investisseurs doivent se garder d'être trop optimistes et d'anticiper un rebond massif du marché. Il est arrivé plusieurs fois dans le passé qu'après une réaction initiale fortement positive à une réunion de la Fed, le marché continu à nouveau de corriger.
  • En outre, la lecture du marché suggère que la Fed serait sur le point d'arrêter les hausses de taux avant la fin de l'année et qu'elle pourrait adopter un ton plus dovish lors du symposium de Jackson Hole en août. Il est probablement prématuré de le croire, et cela restera très dépendant des données. Nous devons également garder à l'esprit que i.) la Fed a toujours l'intention de poursuivre son resserrement et de revenir à un "bilan neutre", ce qui pourrait prendre deux ans selon J. Powell, et ii.) que la réduction du rythme des futures hausses de taux ne signifie pas encore un renversement de la politique de la Fed.
     

Graphique 1: Points Morts d’inflation aux États-Unis

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Sources : Refinitiv, Indosuez Wealth Management.

 

Information importante

28 juillet 2022

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